L’incertitude en gestion de projet est inévitable. Pourtant, beaucoup de chefs de projet ont du mal à la gérer. L’approche la plus souvent utilisée pour gérer les incertitudes est la gestion des risques; mais elle ne couvre pas tous les types d’incertitudes. Et malgré un planning et une gestion des risques clairement définis, les retards, dépassements de budgets ou compromis ne sont pas inévitables.
Pourquoi ces échecs en gestion de projet?
La principale raison des échecs en management de projet est le manque de prise de conscience des différents types d’incertitudes par les chefs de projet. Cela est souvent dû à la définition qu’ils donnent à un projet : « Une unique combinaison de tâches inter-reliées, avec un début, une fin et un résultat bien défini ».
D’après cette définition, un projet devrait être une réussite si les tâches et leurs durées sont clairement identifiées dès le début, si des alternatives sont envisagées et si la vision du résultat final est maintenue tout au long du projet. Malheureusement, dans certains types de projet avec davantage d’incertitudes, comme les projets d’innovation, il est nécessaire de repenser complètement la définition habituelle de projet et la façon de le gérer.
“Les chefs de projet ne peuvent pas prédire le futur, mais évaluer le degré d’incertitude inhérent à leurs projets peut les aider à s’adapter plus rapidement. »
– Arnoud De Meyer, Christopher H. Loch, and Michael T. Pich – Managing Project Uncertainty: From Variation to Chaos
Les 4 types d’incertitude en gestion de projet
Dans leur article « Gestion des incertitudes de projet : de la variation au chaos », De Meyer et al. définissent 4 types d’incertitudes.
1- La Variation
La variation est un type d’incertitude en gestion de projet résultant d’une multitude de petites influences qu’il est très difficile de planifier. Il est cependant possible d’estimer une échelle de valeurs pour prédire l’impact en coût ou en temps de cette incertitude.
Par ailleurs, la variation est inhérente au système et sa probabilité reste élevée. Par exemple, la maladie d’un membre de l’équipe projet ou le mauvais temps sur un chantier sont de la catégorie des variations car il est très difficile de prévoir ces événements mais on peut estimer un nombre de jours supplémentaires à prévoir au cas où ils arrivent.
2- L’incertitude prévisible
Le deuxième type d’incertitude en gestion de projet est l’incertitude prévisible. Contrairement à la variation qui résulte d’une multitude de petites influences, l’influence d’une incertitude prévisible est considérée comme unique et identifiable. D’autre part, l’incertitude prévisible n’est pas forcément inhérente au système et sa probabilité est souvent plus faible que pour les variations. Ce type d’incertitude correspond à des événements qui sont déjà apparus dans d’autres projets ou que l’on sait qu’ils peuvent apparaître. Ils sont généralement gérer avec une méthode de gestion des risques.
Dans la vie courante, c’est pour ce type d’incertitude prévisible que l’on utilise une assurance. Le risque, bien que minime, est clairement identifié (accident de voiture, incendie de la maison) et des actions préventives sont mises en place pour réduire la probabilité d’occurrence (maintenance de la voiture, détecteur de fumée).
3- L’incertitude imprévisible
Le troisième type d’incertitude en gestion de projet est l’incertitude imprévisible. Il s’agit d’incertitudes impossibles à identifier car jamais arrivées auparavant; ou d’incertitudes dont la probabilité est si faible qu’elles ne sont pas prises en compte dans le management des risques.
Cela peut sembler étrange, mais si l’on reprend l’exemple de l’assurance, on ne va pas acheter une assurance pour tous les risques existants dans la vie (assurance contre un tremblement de terre dans une zone non-risquée, etc.).
“Ne gérez pas l’inconnu et l’imprévisible comme vous gérez le connu et le prévisible. » -Doug DeCarlo, Oct 2004 – eXtreme Project Management
4- Le chaos
Le quatrième type d’incertitude décrit par De Meyer et al. est appelé le chaos. Le chaos est une incertitude extrême et se distingue de l’incertitude imprévisible par le manque d’hypothèses et de buts stables dans le projet en général. Les projets avec des incertitudes imprévisibles peuvent parfois sembler chaotiques, mais ils restent stables du point de vue des objectifs et des hypothèses clés du projet.
Au contraire, dans les projets avec une incertitude extrême, ces incertitudes sont attendues. Il s’agit le plus souvent de projets de Recherche & Développement et d’innovation. Dans ces projets, les revues de projet ne consistent pas à faire le point sur l’avancée des tâches, mais plutôt à repenser le projet et redéfinir des hypothèses à partir des informations récentes découvertes. Souvent le résultat final du projet sera très différent du résultat envisagé initialement.
L’important pour un chef de projet est de prendre conscience de ces différentes incertitudes, d’être prêt à s’adapter et de rester ouvert à de nouvelles solutions.